« Et j’abattrai l’arrogance des tyrans » de Marie-Fleur Albecker
« C'est l'histoire de Johanna Ferrour, c'est l'histoire de Richard Plantagenêt le deuxième, c'est l’histoire d'un paysan, c'est l'histoire de John Ball et de Wat Tyler, c'est l'histoire du mois de juin 1381, c'est l'histoire du mois de juin 1381, c'est l'histoire des Jacques, des Tuchins, des Remensas, des Hussites, des Rustauds, c'est l'histoire des soulèvements des gens ordinaires, c'est une histoire de terres, d'injustice, de liberté, de foi et d'horizons perdus ».
Voilà une primo-romancière qui n’a pas froid aux yeux ! Tout me plaisait déjà avant l’ouverture du livre : sa magnifique couverture et ce titre si fort. Une fois les premières pages lues, j’ai su que j’allais être conquise. Et que dire du sujet tellement d’actualité !
Nous sommes dans l’Angleterre de la semaine de Pentecôte 1381. La décision d’une nouvelle taxe provoque la grogne chez les paysans. Un soulèvement s’ensuit. Il est temps de montrer aux seigneurs et au roi de quel bois se chauffent les gueux. La jeune Johanna Ferrour, prisonnière d’un mariage foireux et éprise de liberté, se retrouve être la seule femme au cœur de ces émeutes. La soif de liberté et d’égalité qui monte des populations les plus pauvres incite aussi Johanna à se positionner en tant que femme. Pourquoi ne jouirait-elle pas des mêmes droits que les hommes ?
C’est au cœur de cette révolte populaire et du cheminement feministe de Johanna que nous plonge Marie-Fleur Albecker. Briser les barrières, donner plus de justice, voilà des thèmes un peu décalés pour le Moyen-Âge. De plus, la langue de l’auteure est forte, très orale, contemporaine. Tout semble complètement anachronique et pourtant ça marche. On plonge littéralement car Marie-Fleur Albecker rend ses personnages attachants dans leurs travers et leurs espoirs. De plus, elle a l’art de raconter, d’oser poser avec malice des questions contemporaines dans cette Angleterre médiévale « fictive ».
Bien évidemment, certains lecteurs pourront être déroutés par cette grande liberté de ton qui alterne avec des passages plus descriptifs et mesurés mais au moins il y a de l’audace et ça n’arrive pas si souvent en littérature. Les « hasards » du calendrier éditorial font que ce roman a un écho particulier dans l’actualité : l’après MeToo pour l’aspect féministe et les gilets jaunes pour le côté révoltes populaires.
Bref, c’est un roman qui se savoure comme un bonbon (ou une bonne pinte, je vous laisse choisir) et qui a toute sa place dans le catalogue des Forges de Vulcain.
Marie-Fleur-Albecker – Et j’abattrai l’arrogance des tyrans – Aux forges de Vulcain – 208 pages.