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LES LECTURES DU MOUTON
20 août 2018

« Tenir jusqu’à l’aube » de Carole Fives

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« Je veux connaître la joie d’être une femme, pas juste une mère. C’est fini l’époque où la femme était à la maison pour s’occuper des enfants. Aujourd’hui, elle a le droit de voter, de travailler, de faire du sport si elle veut. Mais dans les mentalités, rien n’a changé. Je suis une mère indigne bien sûr, mais le père, c’est étrange, personne n’en parle ! On ne lui reproche rien. Il n’a pas vu sa fille depuis deux ans […] Elle est où l’égalité entre les hommes et les femmes ? Les hommes s’en sortent bien, je trouve. Ils étaient là pour les faire, ces enfants ! Mais combien assument au final ? »

Une jeune femme célibataire élève seule son enfant de deux ans. Le père a pris ses clics et ses clacs du jour au lendemain sans se préoccuper de son fils. La jeune femme assume seule toute l’intendance avec beaucoup de difficultés matérielles mais aussi une lassitude et une fatigue grandissantes. Elle rêve de s’échapper de temps en temps de son quotidien harassant, de son fils très prenant. Alors, elle décide de profiter de son sommeil le soir pour sortir un peu, puis plus longtemps, de plus en plus longtemps… peut-il arriver quelque chose de grave quand son enfant dort chez soi ?

Petit roman par sa taille mais gros roman par ce qu’il dégage à la lecture et par la réflexion qu’il invite quand on le referme. Si le livre m’a parlé en tant que femme et en tant que maman, nul besoin d’être l’un ou l’autre pour mesurer le poids des questionnements. Carole Fives a su mettre le doigt là où ça fait mal dans notre société. À l’heure où l’on prône l’égalité homme-femme, les enfants restent un domaine dévolu en grande majorité aux femmes. On parle plus souvent de maternité que de paternité ou même encore de parentalité. Être mère est devenu un rôle bien complexe et ambivalent. On souhaite que les pères s’investissent davantage et pourtant la plupart des parents solos sont des mamans solos. Le personnage du roman se retrouve isolé dans ce rôle car rien n’est fait pour faciliter sa vie : elle aménage son travail alors qu’elle manque d’argent, ne peut déléguer. Elle est tout bonnement emprisonnée. Quand une maman solo ose enfin penser à plus de liberté, elle subit des critiques et des pressions de la part d’autres mamans ! Les forums de discussions où surfe notre héroïne montrent à quel point la pression sociale sur les enfants n’est pas qu’une démission des hommes mais aussi la faute de certaines femmes qui s’enferment dans un rôle qu’elles comptent jouer à la perfection. Les « brebis égarées » ou les « Blanquette de monsieur Seguin » aspirant à la liberté sont vite mises au pilori. Dans nos sociétés qui ont connu récemment la crise, la famille devient une valeur refuge et un signe ostentatoire. Certaines femmes finissent par scénariser leur maternité, exhibant leur progéniture – forcément parfaite – sur Instagram ou tout autre réseau social. Le serpent se mord la queue…

Cependant, les familles unies sont-elles si parfaites ? Question qui a tout son sens dans ce roman mais je ne vous en dirai pas plus… Un roman qui monte crescendo comme un bon polar et qui vous laissera avec une fin surprenante. Lisez-le !

Carole Fives – Tenir jusqu’à l’aube – Gallimard L’arbalète – 180p

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Commentaires
A
Le sujet me tente vraiment. Je note le titre.
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