« La ballade de l’enfant gris » de Baptiste Beaulieu

Difficile d’évoquer un lieu comme un service d’oncologie pédiatrique, difficile d’évoquer la mort d’un enfant, difficile pour les soignants de composer avec. Aborder un tel sujet ne pouvait se faire que par un auteur qui connaît bien ce milieu, ces drames mais surtout par un auteur sensible, qui sait trouver les mots pour exposer ce qui fait mal mais sans jamais tomber dans le larmoyant. Cet auteur est Baptiste Beaulieu.

Jonas, dit Jo’, est un jeune interne en pédiatrie. Sa vie est bouleversée quand il rencontre un petit garçon de sept ans : No’. No’ est atteint d’une leucémie et nous savons dès le départ qu’il meurt. Les liens sont d’autant plus forts entre les deux que la mère, Maria, est rarement présente.

Après le décès, la « déchirure », Jo’ est confronté au fantôme de No’. Sa vie personnelle en pâtit et il cherche à se libérer de cette présence, à libérer l’enfant. Jo’ comprend vite qu’il doit pour cela retrouver Maria et comprendre ses nombreuses absences pendant la maladie de son fils. Cette recherche emmène Jo’ en Italie où il rencontre deux vieilles malicieuses, Cataracte et Glaucome, mais aussi à Jérusalem.

Le récit alterne entre des chapitres avant la « déchirure » où on suit No’ dans la progression de sa maladie et ses relations avec sa mère et des chapitres après la « déchirure » quand Jo’ mène son enquête sur la mère.

Baptiste Beaulieu évoque très bien la difficulté pour un soignant de mettre de la distance avec son patient, de « ne pas trop s’impliquer émotionnellement » surtout quand il s’agit d’un enfant. D’ailleurs, est-ce vraiment nécessaire et possible de se forger une carapace ?

Le roman aborde aussi avec beaucoup de justesse des questions sur l’amour sous toutes ses formes : Doit-on aimer instantanément son enfant quand il naît ? Être amoureux, est-ce tout partager avec l’autre, tout accepter de l’autre ? L’amour est-il forcément unique, conventionnel ?

Baptiste Beaulieu met aussi un coup de pied aux préjugés et aux normes de la société : la pression que l’on met aux mères, l’image de la femme mais aussi des homosexuels ou bisexuels.

Les personnages sont tous hyper touchants. Si j’ai beaucoup souri avec Cataracte et Glaucome, j’ai aussi aimé le personnage de Mme Crinchon, atteinte du syndrome de Gilles de la Tourette et qui fait semblant d’être une méchante. Enfin, comment ne pas être attaché à Jo’, le pendant de Baptiste ?

Ce roman m’a touchée pour des raisons personnelles. Même si ce n’était pas en oncologie, j’ai vu les combats des bébés pour vivre, j’ai vu le dévouement des soignants aussi bien auprès des patients que des parents, j’ai entendu des alarmes sonner et des pédiatres qui courent, j’ai vu des prénoms d’enfants disparaître des portes de chambre et je me taisais car je savais.

Un roman profondément humain que je recommande même si je pense que le roman aurait gagné à être un peu resserré (mais je chipote). 

L'avis d'Eirenamg : 

Ballade onirique et émouvante la ballade de l'enfant gris de Baptiste Beaulieu - le blog d'eirenamg : 1 gourmandise à partager: la lecture

Il y a des petits bijoux de lecture qu'on découvre comme ça par hasard, celui-ci en fait partie, sa couverture, son auteur et le bouche à oreille m'ont poussé à ouvrir ses pages. Et ça a été un choc, une écriture sensible, bienveillante et très évocatrice.

http://eirenamg.canalblog.com

Baptiste Beaulieu – La ballade de l’enfant gris – Mazarine – 416p

Comments

[Help]

Je n'arrive pas à comprendre la fin de ce livre, quelqu'un peut m'expliquer ??

[AuFildesPlumes]

Le genre d'histoire qui prend aux tripes! Depuis que je suis maman j'ai beaucoup de mal avec ce genre de livre...

[L'ivresse littér]

Un livre qui est dans ma liste depuis trop longtemps. Il faudrait peut-être que je songe à l'acheter car je sais d'avance qu'il me touchera en plein cœur.

Très belle chronique.

[Echappeelitt]

Un livre qui a été un gros coup de coeur pour ma part :D ! Contente de voir que tu as aimé :)