« Une fille et un flingue » d’Ollivier Pourriol
« Plus il y a d’argent pour la star, moins il y en a pour le film. C’est un cercle vicieux. Ça fait une merde de plus sur les écrans, mais Gégé peut s’acheter un nouveau vignoble, et Mado garder sa maison. Vous comprenez ? Non ? Je vous avais prévenus, ça sert à rien l’école. Si y a besoin d’expliquer, c’est que tu peux pas comprendre.
Je résume : les mecs de la télé sont tellement trouillards qu’ils préfèrent payer une fortune des noms qu’ils connaissent, plutôt que plonger dans l’inconnu. Alors qu’ils y plongent. Qu’ils le fassent en tenant la main de quelqu’un de connu ou pas, rien ne leur garantit qu’il y aura de l’eau au fond de la piscine. C’est ça, le cinéma : plonger les yeux fermés dans une piscine vide, et essayer de la remplir pendant le temps de la chute. »
Deux frères, Dimitri et Aliocha Koulechov étudiants à la Cité du Cinéma de Luc B., ont une seule obsession : faire un film et ce par tous les moyens possibles. L’argent faisant défaut, ils se lancent avec un énorme culot à la recherche d’acteurs célèbres. De toute façon, c’est bien connu, pas besoin d’innover, pour réussir un bon film, il faut une fille et un flingue, le reste coule de source. Leur objectif : convaincre Gérard D. et Catherine D. de tourner un vrai/faux braquage d’une bijouterie pendant le festival de Cannes, le tout chapeauté par le grand Jean-Luc G. et pour seule caméra un téléphone portable !
On sait dès le départ que cette histoire les conduit derrière les barreaux mais était-ce réellement une escroquerie ? Une idée de génie mal comprise ? De la manipulation ?
Ollivier Pourriol nous livre un roman surprenant aussi bien sur le fond que sur la forme. En effet, le roman est construit en courts chapitres comme autant de séquences au rythme saccadé. On a l’impression de ne pas avoir affaire à un roman mais à un script racontant l’organisation de ce braquage tellement incroyable qu’on se dit qu’il pourrait être vrai. L’auteur, qui connaît très bien le milieu du cinéma, pose un regard critique assez caustique sur les magouilles pour financer les films français au nom de l’exception culturelle, les soirées Canal + avec l’arrivée de Bolloré… Mais, il offre aussi un regard amoureux, du moins c’est mon opinion, pour les films et les acteurs. Les dialogues avec Gérard D. valent leur pesant de cacahuètes, Catherine D. montre un visage bien différent de l’actrice froide où on l’a souvent cantonnée.
Ce roman pourra en dérouter plus d’un, je pense même qu’il déplaira à certains lecteurs – surtout que le début du roman déroute un peu – mais il a au moins le mérite d’offrir quelque chose de nouveau, d’intéressant à découvrir.
Ollivier Pourriol – Une fille et un flingue – Stock – 282p.