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LES LECTURES DU MOUTON
28 juin 2020

« Buvard » de Julia Kerninon

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« Je suis un enfant parce que c’est le seul mot que je trouve pour dire combien c’est bon d’aimer les choses les plus infimes, et d’en tirer du plaisir sans honte, mais aussi d’être soucieuse, comme les enfants seulement le sont, soucieuse, orageuse, légère ».

Lou, un jeune étudiant, est fasciné par l’œuvre de l’écrivaine Caroline N. Spacek. D’une grande précocité, elle a livré des ouvrages à la beauté scandaleuse, à la perfection énigmatique. Sa vie est tout aussi secrète que sulfureuse, au point d’attirer les journalistes qui la traquent. Recluse dans une demeure du Devon, elle accepte malgré tout l’interview du jeune Lou. Ce qui devait durer une journée s’étend tout l’été. Par petits bouts, Lou absorbe l’histoire de Caroline : son enfance difficile, ses débuts dans l’écriture, ses amours, ses drames. C’est une femme qui vit avec intensité : elle est l’allumette qui s’enflamme, se consume vite et renaît de ses cendres. Les confessions de Caroline finissent par laisser des traces sur Lou ; elles réveillent ses propres blessures, ses propres démons. Un été qui réunit deux êtres cabossés par la vie mais qui se relèvent malgré tout par la lecture et l’écriture.

C’est un roman sur le processus de création, sur la frontière mince entre le réel et la fiction. Comment un parcours de vie peut influencer l’écriture, nourrir la fiction et, par effet miroir, comment cette dernière permet de prendre du recul sur sa propre vie ? Caroline mène une vie vouée à l’écriture qui, malgré les drames, ne l’a jamais quittée. Elle est l’exutoire, la soupape et sûrement sa plus grande histoire d’amour même si sa passion tumultueuse avec Jude Amos, son mentor, est forte et belle. C'est aussi un roman sur la transmission : l'amour de l'écriture passe de Jude à Caroline puis de Caroline à Lou.

Un sujet sur la création plutôt audacieux pour un premier roman. J'aurais pu trouver cette histoire d'écrivaine torturée qui ne vit que pour son art un peu stéréotypée mais Julia Kerninon, par une narration solide et un art du suspense, a balayé mes appréhensions. L’écriture vivace et percutante, le rythme fou et le style un peu doux dingue sont la marque de fabrique de l’autrice.

Après « Ma dévotion », « Une activité respectable » et « Le dernier amour d’Attila Kiss », il était temps de découvrir son premier roman.

Julia Kerninon – Buvard – Actes Sud-Babel – 220p

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