« Les falaises » de Virginie DeChamplain
« Les femmes de ma vie. On se succède sans se voir, comme des ombres qui courent devant les miroirs, sacrent des coups de poing dedans et continuent leur route pour voir le monde ».
Elle pense qu’elle est brisée. V. Comme la vague qui rencontre le rocher. Brisée. Comme le corps de cette mère-sirène rejeté par le Saint-Laurent, « ses cheveux comme des algues dans le ressac ».
V. revient dans sa maison natale en Gaspésie, après plusieurs années d’absence. Funérailles de la mère, deuil d’une enfance, souvenirs à mettre en carton, vie à vider.
V. se remémore la mère, fantasque, perdue, « grand’folle ». Elle tombe sur les carnets intimes de sa grand-mère. Elle découvre qu’elle fait partie d’une lignée de femmes qui n’ont eu de cesse de partir « le plus loin possible. Toujours plus loin » pour « trouver un chaos ailleurs ». V. pense que son chemin doit passer aussi par un départ. Pour les trouver. Pour se retrouver. Pour revenir. Chloé l’attend. La maison familiale l’attend. Sa vie l’attend.
Virginie DeChamplain livre un voyage intergénérationnel où les femmes de la famille sont des êtres cabossés, sensibles, fragiles mais forts aussi. Des femmes qui ne cherchent que la fuite alors qu’elles sont terriblement ancrées à leur terre. Des femmes qui sont unies bien au-delà des liens du sang, par une nécessité d’exister ailleurs.
Le roman, rythmé par des répétitions, est servi par une belle écriture ponctuée de ce vocabulaire québécois que j’aime (re)découvrir. Il est entrecoupé d’extraits du journal de la grand-mère et de petits textes poétiques. Un roman comme un rêve, comme un voyage sur une barque bercée par les courants de la mer(e) ou du Saint-Laurent.
Virginie DeChamplain – Les falaises – La Peuplade – 220p