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LES LECTURES DU MOUTON
23 février 2020

« Le sel » de Jean-Baptiste Del Amo

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« Leur famille est ce fleuve aux courbes insaisissables dont il n’est possible de cerner la vérité qu’en l’endroit où la mémoire de tous afflue pour se jeter, unifiée, dans la mer ».

Le sel est l’histoire d’une famille où règne encore l’ombre d’Armand, le patriarche pourtant décédé d’un cancer. Homme despote, violent, il a marqué de son empreinte tous les membres de cette famille. Chacun tente malgré tout de se libérer d’une enfance, d’un passé, d’événements tragiques. Les souvenirs remontent à la surface, déferlent durant la journée qui précède un dîner, comme les vagues, ce qui fait écho à la citation de Virginia Woolf en exergue du roman.

La mère Louise s’est pliée à toutes les exigences de son mari jusqu’au bout, malgré quelques appels de sirène. Sa fille Fanny ne parvient pas à se remettre d'une tragédie, du détachement de son fils et des infidélités de son mari. Albin a suivi les traces d’Armand en devenant cet homme cynique, cinglant. Jonas, le petit dernier, est homosexuel ce qui est une source de tensions avec son frère. En couple avec Hicham, il peine cependant à oublier un premier amour.

Avec une écriture précise, charnelle et exigeante, l’auteur nous permet d’entrer dans l’intimité de chaque personnage avec ce qu’il faut de profondeur psychologique. Il nous montre la difficulté de faire famille, d’être dans le rôle que l’on vous assigne à l’intérieur de celle-ci, que l’on soit parent, enfant, ou enfant devenu parent. Il y a aussi le poids de l’enfance, des non-dits, des images vues ou des paroles proférées dans la construction d’un être.

La narration change au cours du récit. Nous sommes d’abord dans les pensées de chaque personnage qui, tels des affluents, se rejoignent puis se jettent dans la mer pour un récit plus global, plus collectif. Le roman se termine sur des « îles singulières », des fragments à la dérive que le fleuve aurait charriés.

Le roman est également découpé en trois parties nommées par les Parques comme pour révéler l’impossibilité de briser ce cordon familial fait de chair et de sang. Les pressions familiales que l'on porte en soi semblent ainsi inéluctables. Seule la mort pourra libérer l’individu. À moins d’accepter de vivre avec ce poids pour mieux le supporter.

Jean-Baptiste Del Amo – Le sel – Folio – 350p

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Commentaires
A
J'adore les histoires de famille, alors je vais illico noter ce titre.
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