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LES LECTURES DU MOUTON
5 février 2020

« La femme révélée » de Gaëlle Nohant

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« … je crois que si Tim redoutait les monstres, c’était parce qu’il pressentait que les plus redoutables vivaient parmi nous. Les monstres n’étaient pas là où la presse orientait notre regard. Ils n’habitaient pas ces faces blêmes et vaincues qui levaient leurs mains menottées pour se protéger de l’éclat des flashes. Ils se carraient dans leur fauteuil, acceptaient un bourbon, complimentaient la cuisinière sur son pain de maïs, fumaient le cigare sous la véranda avant de s’en aller dormir d’un sommeil sans rêves ».

Gaëlle Nohant a toujours eu le souci de brosser de beaux portraits de femmes dans ses romans. Même quand elle évoquait Desnos dans son précédent, il y avait Youki en toile de fond, une Youki qui était bien plus forte et stable que l’image qu’elle renvoyait.

Avec La femme révélée, Gaëlle nous offre une fois de plus une belle histoire de femme prise dans les méandres d’une vie qu’elle fuit et d’une société des années 50/60 en plein changement. Une femme qui s’est conformée un temps à ce qu’on lui imposait avant de choisir la liberté.

Eliza Donnelley se réveille un matin dans un hôtel miteux de la gare Saint-Lazare. Pour seuls bagages, elle a ses vêtements, des bijoux, un Rolleiflex, une photo et un faux passeport. L’Américaine originaire de Chicago devient Violet Lee. Nous comprenons très vite que cette fuite est liée à son mari Adam, homme qu’elle découvre sans scrupules. Comme toute femme de cette époque qui recherche la liberté, elle doit payer le prix fort. Elle a abandonné son fils Tim et doit rester discrète.

Dans son exil parisien, Violet croise des personnes qui vont l’aider, la révéler à elle-même : la prostituée Rosa, le photographe Robert, Brigitte et Anton, le jazzman aveugle Horatio et l’américain Sam dont elle tombe amoureuse. L’autre révélation est la photographie. Avec son appareil, pendant qu’elle promène les enfants dont elle a la charge, Violet zoome, clique, immortalise les gens qu’elle rencontre dans le Paris populaire ou dans les banlieues. La « Kodak Girl » ressemble ainsi beaucoup à la photographe Vivian Maier. Malgré tout, le manque de Tim devient pesant.

Les années passent et les circonstances font que Violet peut retourner à Chicago ien 1968, en pleines émeutes raciales. Elle essaie de renouer avec ce fils devenu adulte, tout en photographiant ces femmes et ces hommes qui, comme elle, cherchent la liberté et l’égalité.

Gaëlle Nohant est une autrice qui révèle son écriture dans des récits amples, très documentés, où le souci de justice est important. Paris est, une fois de plus, un personnage à lui tout seul. Par ses qualités romanesques et de précision, nous plongeons rapidement dans le récit. Je regrette peut-être une seconde partie un peu rapide, notamment sur les luttes civiques mais je chipote.

Gaëlle Nohant – La femme révélée – Grasset – 375p

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Commentaires
M
Tout à fait d'accord ! Un beau portrait de femme qui ne renie rien sur ses valeurs même si le prix à payer est important !
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