IMG-6750

« Pour les enfants, les adultes semblent toujours libres. Mais en vérité, il y en a beaucoup qui sont comme prisonniers. Et si on se demande qui les retient, 9 fois sur 10 d’après ce que je sais, ce sont les fantômes qui les hantent » 

Que dire de cet ouvrage sans être dithyrambique ? Tout, je dis bien absolument TOUT m’a plu.

Le dessin d’abord. Présenté comme un cahier, une sorte de journal intime, ce roman graphique est un véritable chef-d’œuvre. Les dessins d’Emil Ferris au stylo-bille sont précis et d’une grande beauté. Le travail est colossal, près de six années pour les deux tomes, pour un rendu éblouissant.

L’histoire ensuite et tous les thèmes qu’elle aborde. Nous sommes dans le Chicago de la fin des années 60. Karen Reyes, une fille de dix ans, passionnée par les vampires, fantômes et autres monstres, enquête sur la mort de sa voisine, la belle Anka Silverberg. Derrière ce synopsis, tout un monde se déroule.

Le thème de la transmission est omniprésent : la transmission historique avec le récit du nazisme et de la Shoah, la transmission familiale (ou son absence).

La quête de soi avec ses différences : quel sens donner à sa vie ? Comment vivre ses émotions, l’amour sans se cacher ? Karen passe son temps à se voir comme un loup-garou parce qu’elle se sent différente des autres, elle aime les filles notamment.

L’art comme l’ouverture au beau, comme évasion, comme résilience. Les visites au musée avec son frère Deeze sont magnifiques.

Enfin – et c’est ce qui a le plus attiré mon attention – qu’est-ce qu’être un monstre ? Karen estime en être un mais tous les personnages qu’elle rencontre dans ce livre sont habités par leur propre monstruosité. La violence verbale, la violence physique, la violence étatique, la violence envers les femmes, la maladie, les préjugés, la perversité, le silence parfois… Notre monde est un démon aux mille visages et chacun fait ce qu’il peut pour survivre dans cet enfer.

Ce livre est monstrueux et c’est beau ! J’ai hâte de lire le tome 2.

À lire, à offrir, à diffuser en tout cas.

Emil Ferris – Moi, ce que j’aime, c’est les monstres – Monsieur Toussaint Louverture – 416p