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LES LECTURES DU MOUTON
7 juillet 2019

« Minuit en mon silence » de Pierre Cendors et « Par-delà nos corps » de Bérangère Cournut

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« La poésie fait un poème de tout, madame, de la vie, du hasard, même de la mort d’un soldat. Un poème écrit avec son sang. Je ne souhaite à personne d’être poète. Votre vie ne vous appartient pas plus que votre mort. On vous croit le plus libre des hommes, mais c’est une liberté dont on ne s’évade pas » (Pierre Cendors).

« Puis, avec le temps, je me suis aperçue que les femmes ont un autre moyen de créer, beaucoup plus puissant. Ce n’est pas seulement parce qu’elles sont dominées par les hommes qu’elles pratiquent moins les arts socialisés. C’est aussi parce qu’elles ont en elles, en plus de leur esprit, une matrice, une sorte de creuset où tout peut advenir, le meilleur comme le pire. Là où il vous faut user de mots, de couleurs ou de musique pour sonder vos tréfonds, nous générons en nous un souffle qui nous met directement en lien avec l’autre monde » (Bérangère Cournut).

Il me semblait impossible de vous parler d’un livre sans évoquer l’autre. Parce qu’ils forment un ensemble, parce qu’ils se font écho bien que leurs auteurs soient différents.

Pierre Cendors a publié Minuit en mon silence en 2017 au Tripode. Le jeune lieutenant Werner Heller qui sent sa mort imminente écrit une longue lettre testament à la jeune Else, une femme rencontrée à Paris. Elle lui avait donné son accord un portrait. Un accord comme un acte d’amour qui va le bouleverser. Pierre Cendors livre une lettre poétique, lyrique, maîtrisée de bout en bout. Le contenu est aussi sombre qu’il est sublime. La mort marque peu à peu la lettre de son empreinte mais cette dernière reste le tombeau de l’amour. Un amour idéalisé, fantasmé, où Werner convoque le mythe orphéen. Un amour porté vers une femme mais aussi vers la littérature. Pierre Cendors a voulu rendre hommage à tous ces écrivains et poètes sacrifiés sur l’autel de la guerre ; le récit est d’ailleurs dédié à Alain-Fournier.

Début 2019, sa consœur Bérangère Cournut décide de donner la parole à Else dans Par-delà nos corps.  Elisabeth, de son vrai nom, répond à la lettre de Werner vingt-cinq ans plus tard, au moment où une nouvelle guerre éclate. De la Grande Guerre, elle a connu le veuvage, le remariage avec le croate Gorki et la naissance des ses deux fils. D’origine bretonne, fille de l’océan, sa lettre est ponctuée par les éléments : l’eau, la terre, la forêt. Tout est éminemment organique, minéral ce qui tranche avec le caractère mythique voire mystique du texte de Pierre Cendors. La chair, le sang, le corps sont les portes d'entrée dans le texte, dans une poésie entêtante.

Ces deux textes aussi proches qu’éloignés forment un diptyque fort, où l’amour entre les êtres rejoint l’amour de l’écriture.

Pierre Cendors – Minuit en mon silence – Le Tripode – 80p et Bérangère Cournut – Par-delà nos corps – Le Tripode – 80p

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