« L’Amérique derrière moi » d’Erwan Desplanques

« Un homme doit s’asseoir ici et poser toute l’Amérique derrière lui » - Henry David Thoreau.

Comment devenir père quand le sien va mourir ?

Erwan Desplanques apprend le décès prochain de son père et la grossesse de sa femme pendant les fêtes de Noël 2013.  De ces deux événements concomitants, l'auteur livre un beau roman autobiographique. Son double littéraire se remémore avec tendresse mais sans complaisance son enfance et son adolescence avec des parents très romanesques. « Ton père et moi, on est un peu comme Richard Burton et Liz Taylor. Sans les diamants » dit la mère pour évoquer son couple. Le divorce les sépare… pour un an seulement.

Le narrateur s’attarde surtout sur le père, un amoureux fou de l’Amérique. Il collectionne les armes, les surplus militaires ou les Jeep. Il a même été convié à l'investiture de Barack Obama. L’anglais, qu’il utilise dans des petits mots écrits, permet de dire à son fils tout l’amour qu’il a, avec pudeur. « Mon père voulait être un héros américain. Nous n’avons jamais tenté de le dissuader ». C’est un homme qui n’a pas vraiment connu la guerre et le regrettait un peu alors que les grands-parents l’avaient subie de plein fouet : « ma famille s’était bâtie sur une double fêlure, celle d’une guerre subie et d’une guerre réclamée, et je me voyais comme un dommage collatéral, conscient d’avoir devant lui un écheveau à résoudre et une mémoire à porter ». Cette guerre perdue d'avance, c’est le cancer qui la lui donnera. 

Le décès du père et la naissance du fils marquent un tournant dans la vie du narrateur. Il fait le bilan de sa vie parisienne tiraillée entre le journalisme et les tournées avec son groupe de rock. Une envie de changement fait son apparition, un changement tourné vers le Sud-Ouest et l’écriture.

J’ai beaucoup aimé ce récit serré, aux chapitres courts, toujours sur le fil. L’écriture est sensible, élégante, pudique tout en étant lucide. Un auteur que je découvre et que j’aurai plaisir à suivre.

Erwan Desplanques – L’Amérique derrière moi – éditions de l’Olivier – 175p