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« De temps à autre, je prends sa main entre mes huit doigts. Parfois, elle la retire. D’autres fois, elle me regarde sans me voir. Il m’arrive alors de percevoir sur son visage un voile que je préférerais ne pas reconnaître. Cela m’affecte parfois, mais la plupart du temps ce n’est pas le cas. Ainsi va la vie. Je voudrais dire à ceux qui passent, à qui voudra bien m’écouter, que les leçons viennent de la vie et non des histoires. Malheureusement, ce sera en vain, les paroles balayées par le souffle de ceux qui tiennent à faire entendre leurs propres mots ».

Lubok Sayong est un village malaisien où sont réunis deux rivières, trois lacs et des légendes autour. Seulement voilà, ces fameuses légendes ne parviennent pas à en faire un lieu touristique intéressant. La vie à Lubok Sayong, ce sont les fréquentes inondations qui viennent rythmer le quotidien des habitants blasés. Pourtant, dans ce « trou » vivent des personnages hauts en couleur qui valent le détour. Nous avons Auyong, l’un des narrateurs, qui a quitté la frénésie de Kuala Lumpur pour diriger une conserverie de litchis à Lubok. Beevi est une femme de poigne et de conviction qui fait de la Grande maison des chambres d’hôtes. Enfin, Mary-Anne, l’autre narratrice, se retrouve confiée chez Beevi à la suite à de circonstances expliquées dans le roman. Adolescente vive et un peu différente des autres gens de son âge, elle vient mettre un peu de gaité dans le quotidien de nos vieux briscards. C’est sans compter sur de nombreux personnages secondaires qui apportent leur lot de vécus et d’histoires. Nous les suivons dans leur quotidien souvent morne mais où parfois des événements étonnants, cocasses ou dramatiques surviennent. La somme des folies de leurs vies. Shih-Li Kow a su faire de ses personnages des êtres attachants qu’on a vraiment du mal à quitter à la fin du roman. Autre atout majeur de ce livre, l’auteure nous livre un portrait intéressant de la Malaisie : les problématiques environnementales, le fossé ville/campagne, le développement du tourisme mais aussi les problèmes de société, de mœurs. Enfin, n’oublions pas la part de magie, de légendes qui font partie du patrimoine malaisien. Un bien beau premier roman qui vous met du baume au cœur, un sourire aux lèvres tout en faisant réfléchir. N’hésitez pas à le lire, comme dirait Beevi, il est inconcevable de ne pas l’aimer.

Shih-Li Low – La somme de nos folies – Zulma – 370p