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LES LECTURES DU MOUTON
21 avril 2018

« Assommons les poètes » de Sophie G. Lucas

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« L’autre voulait m’arracher un assentiment, l’autre voulait ma peau une fois encore, comme à chaque rendez-vous, il prendrait un morceau de moi et l’accrocherait à côté de ses autres trophées, hommes et femmes tendus dans des dossiers suspendus.

La poésie sortait de ma bouche, la poésie me débordait des mains, la poésie m’avait prise pour maison, mais il me demandait de remplir un chariot de courses chaque semaine et de faire partie du grand cirque, hummpf ».

Assommons les poètes ! Comment ne pas y voir un hommage appuyé à Baudelaire et à son Assommons les pauvres que l’on retrouve dans Petits poèmes en prose ? Ce titre choc est exactement ce qu’il fallait pour illustrer ce magnifique petit recueil de textes qui rend hommage aux poètes, à la poésie et à la littérature de façon générale. Une publication dans les éditions de la Contre-Allée est aussi une évidence puisque que cette maison a fait sienne ce passage de Bashung : « Je délaisse les grands axes et prends la contre-allée ». Le poète emprunte forcément la contre-allée : il prend un chemin différent des autres, souvent mal compris. Tout concourt aujourd’hui à ne pas faire de la poésie. Les romans et récits dominent la littérature et la poésie est à la marge, réduite à la portion congrue. Et puis, que de préjugés ! Faire de la poésie n’est pas considéré comme un travail. Le poète est vu comme un être marginal, voire un fainéant peut-être. La poésie c’est bien gentil mais c’est de la fantaisie, non ?

Dans ce bel ouvrage qui recueille des textes rédigés depuis 2003 et organisé en quatre parties (Ecrire faire écrire ; Lire (à voix haute) ; Résider ; Résister), Sophie G. Lucas nous offre un beau plaidoyer pour la poésie mais aussi un acte de résistance face aux on-dit. La plupart des textes sont autobiographiques mais la fiction a aussi la part belle : l’auteure utilise notamment la Alice de Carroll et l’image de Jack Kerouac pour faire passer des messages. Chaque segment du livre est accompagné des références qui donnent envie de se (re)plonger dedans. Le voyage est aussi un élément important dans la vie du poète et Sophie G. Lucas évoque ses séjours à Montréal ou à New-York pour montrer l’étendue des horizons possibles. Et puis, malgré les embûches, il existe des instants de grâce lors de lectures publiques ou dans des ateliers d’écriture en prison où chacun repart avec un « kekchose » en soi.

Lisez ce beau petit ouvrage qui tient dans la poche, vous en sortirez forcément vous aussi avec un « kekchose », un supplément d’âme peut-être…

Sophie G. Lucas – Assommons les poètes – éditions La Contre-Allée – 160p

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