« Danser au bord de l’abîme » de Grégoire Delacourt
Emma a la petite quarantaine. Elle forme depuis longtemps un couple modèle avec Olivier. Ils ont trois beaux enfants. Mais, insidieusement, le quotidien a épuisé le couple. Emma s’en rend compte violemment quand elle rencontre un homme qui la fait perdre pied à la brasserie André. Elle ne veut plus de cette vie où le désir a déserté et souhaite tout claquer pour partir avec lui. Mais, la liberté a un prix. C’est d’ailleurs en utilisant en fil rouge la lettre/nouvelle La chèvre de monsieur Seguin d’Alphonse Daudet que Grégoire Delacourt nous montre ce prix.
Comme il aime le faire, Grégoire Delacourt a une fois de plus pris un personnage féminin pour incarner ce roman du désir, de la liberté mais aussi du deuil (à plusieurs niveaux) et de la résilience. L’histoire en tant que telle est éculée mais Grégoire Delacourt s’en sort plutôt bien malgré une production inégale.
Le roman est composé de trois parties. La première est celle de la rencontre d’Emma avec Alexandre, de la montée du désir, du bilan de vie et de la décision. Les chapitres, très courts, se succèdent avec des numéros qui vont en décroissant. Nous assistons au compte-à-rebours d’une césure qui va bouleverser la vie d’Emma. Cette partie comporte les plus belles envolées lyriques dont Grégoire Delacourt a le secret.
La seconde partie qui marque « l’après », un après que je ne peux vous dévoiler pour ne pas gâcher la lecture, est beaucoup plus lente, longue. Emma est dans une phase de doutes, de questionnements et de chagrin. Même si le personnage de Mimi apporte un peu de corps à cette partie, j’avoue m’être un peu ennuyée. Il faut attendre la dernière partie pour retrouver l’élan du début. Emma est confrontée à un autre événement qui la rapproche de sa famille. En parcourant la route des vins, elle achève progressivement son processus de résilience : le prix a été payé, la peine bue et elle peut aller de l’avant même si la mélancolie et les souvenirs restent.
Grégoire Delacourt nous a livré un roman sensible, touchant mais peut-être un peu trop larmoyant à mon goût. Au-delà de la référence à La chèvre de monsieur Seguin, j’ai été sensible aussi aux multiples autres références littéraires, cinématographiques, artistiques et musicales. Je pense notamment à la Nuit transfigurée d’Arnold Schoenberg qui évoque justement l’aveu, le pardon, le côté lumineux et obscur des êtres. Si nous n’avons pas affaire à un millésime d’exception, ce Danser au bord de l’abîme (quel merveilleux titre !) est tout de même fort savoureux et mérite bien la lecture. Je remercie l’auteur d’avoir mis en fin d’ouvrage la lettre/nouvelle de La chèvre de monsieur Seguin, c’est un plaisir de la relire.
Ce roman a fait l'objet d'une lecture commune avec trois blogueuses. Je vous invite à lire leurs chroniques :
L'avis d'Eirenamg :
Comme à l'opéra ou dans un ballet, on passe par toutes les émotions avec ce livre. La passion ardente avec cette rencontre inattendue entre Emma et Alexandre, la tristesse, les regrets, la nostalgie mais aussi l'amitié, la joie. Avec une narration éclatée, on suit l'évolution d'Emma qui devient femme, s'apprivoise et apprend à s'aimer, à faire fi du regard des autres.
http://eirenamg.canalblog.com
L'avis de Leiloona :
Alexandre était un incendiaire, et j'avais eu envie d'être enflammée. Il était un cartographe qui avait relevé mes failles. Un homme qui avait deviné ma grammaire. Ecrire sur le désir amoureux, sur une rencontre, une évidence entre deux personnes. Beauté, état de grâce, désir, bonheur.
http://www.bricabook.fr
L'avis de Nath :
Danser au bord de l'abîme Grégoire DELACOURT Editeur :JC Lattès -janvier 2017- Quel bonheur que ce nouvel opus de mon écrivain-chouchou Grégoire Delacourt ! Ceux qui me connaissent (et maintenant les autres) savent combien cet auteur compte pour moi, certains de ses livres m'ayant accompagnée lors d' abîmes personnels.
http://nathdelaude.canalblog.com
Grégoire Delacourt – Danser au bord de l’abîme – JC Lattès – 320p