« Un jour je lui avais demandé : ‘’Pourquoi vous être intéressé à Roberto Diaz Uribe ?’’ Il avait secoué la tête en me fixant comme on fixe ce satané grille-pain qui fait sauter les plombs tous les matins. ‘’Je crois que ce que je déteste le plus au monde ce sont les questions qui commencent par pourquoi. C’est à toi de trouver les raisons aux événements. Je peux te dire comment je me suis intéressé à lui. Mais en aucun cas tu ne peux attendre de moi que je réponde à une question qui commence par pourquoi. Ce serait comme de demander à un peintre pourquoi il peint plutôt des femmes nues que des dahlias, et à un écrivain pourquoi son personnage s’appelle Pierre-Alexandre plutôt que Jean-Baptiste et pourquoi celui-ci choisit de se donner la mort à la fin du livre avec du cyanure plutôt qu’avec de l’arsenic. Une question qui commence par pourquoi est une question paresseuse. Je ne veux plus jamais t’entendre poser une question de cette sorte. »
1983. La jeune Atanasia Bartolome âgée de 13 ans se rend dans un musée à Bilbao. Elle reste figée devant un tableau d’une femme nue. Le peintre est Roberto Diaz Uribe. À compter de ce jour et de ce coup de foudre artistique, elle enquête sur ce peintre et finit en quête d’elle-même et de sa famille. En effet, elle ne s’attend pas à ce qu’Uribe soit si proche d’elle : c’est le cousin de son père et un secret pèse sur la famille à son sujet. Atanasia se retrouve à parcourir l’Espagne et à venir jusqu’à Paris pour en savoir plus sur ce parent qui la fascine.
Véronique Ovaldé nous offre un roman d’apprentissage digne d’une aventure. L’exil et la recherche filiale de la jeune Atanasia permettent au lecteur d’être plongé dans des récits qui remontent pour certains au XVIIe siècle. On y trouve pêle-mêle les allusions à la Peste, la colonisation du Congo et ses conséquences, les attentats de l’ETA. L’enquête d’Atanasia la conduit à rencontrer des personnages assez éclectiques ; notons surtout le professeur russe à Paris, Vladimir Velevine avec qui elle a une relation particulière. L’écriture de Véronique Ovaldé est fluide et assez jubilatoire. Le ton est rythmé et l’humour est présent notamment dans les passages où Atanasia imagine un caméraman qui prend des prises de ses émotions et instants vécus. C’est un hymne à la liberté, à la découverte et à l’expérimentation.
Malgré tout, ce roman comporte des longueurs : à force de digressions, l’auteure m’a un peu perdue. Si j’ai apprécié la curiosité et la liberté de la jeune Atanasia, je n’ai pas réussi à être vraiment très attachée à elle. Elle est trop souvent dans le contrôle de ses émotions et moi j’aime les personnages qui se livrent véritablement.
Un roman intéressant d’une auteure qui sait jouer avec la langue mais qui ne laissera pas un souvenir impérissable.
Véronique Ovaldé – Soyez imprudents les enfants – Flammarion – 355p