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LES LECTURES DU MOUTON
18 décembre 2016

« Au pays de la fille électrique » de Marc Graciano

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« Elle partirait le lendemain, […] elle alla une dernière fois sur le banc dans le parc avec le jeune infirmier, […]puis le jeune infirmier se mit à lui parler sans la regarder et lui dit qu’il ne bénirait jamais assez le jour où elle avait été hospitalisée parce que c’était ainsi qu’il avait pu la rencontrer, et il lui dit qu’elle était un être rare et beau et qu’il était heureux qu’elle existe, et il lui dit qu’il ne savait pas ce qui s’était vraiment passé pour elle mais que c’était sans doute quelque chose d’effroyable, […]mais il dit que, quoi qu’il se soit passé, ça n’avait pas pu entamer sa valeur et sa beauté…  »

Avec ce roman, je pense très sincèrement détenir la lecture la plus éprouvante et la plus étonnante de l’année. Et pourtant, rien ne m’aurait mis sur le chemin de cette lecture si je n’avais pas croisé un auteur : Gilles Marchand. Lors de notre première rencontre au salon de Boulogne, en compagnie de Namg, nous avons parlé évidemment littérature et c’est lui qui nous a conseillé ce roman en prenant soin de nous prévenir que les premières pages seraient difficiles à lire. Et c’est peu dire !

Ce court roman s’ouvre sur un prologue de près de vingt pages racontant avec minutie et barbarie le viol d’une jeune femme par quatre hommes. Les descriptions donnent la nausée, servies par une quasi-absence de ponctuation. On se prend la violence, la barbarie en pleine gueule. En lisant ce passage éprouvant, j’ai eu l’impression de me retrouver devant la scène de viol de Monica Bellucci dans Irréversible de Gaspar Noé. Je me suis d’ailleurs demandée s’il était vraiment nécessaire d’en écrire autant, aussi longuement sur le sujet. Est-ce pour rendre la suite plus intéressante, plus belle ? Car oui, une fois ce prologue terminé, on plonge dans un autre univers. Si les différents chapitres ne contiennent qu’une seule phrase, ils sont beaucoup plus courts. Ils racontent le périple à pied de la jeune femme pour rejoindre l’océan, cet océan où elle souhaite se plonger pour se laver, laver l’horreur qu’elle a subie. Durant ce voyage, elle va croiser quatre hommes – même nombre que les violeurs, est-ce un hasard ? – qui redonnent foi en l’Homme et l’homme : l’homme au fourgon, le jeune infirmier et les deux gendarmes. Ces différentes pages sont écrites dans un style qui étonne. En effet, le récit est rempli de répétitions (« c’était », « il y avait », « et puis ») qu’on a pour habitude de déconseiller aux auteurs. Mais là, ce style rend le texte éminemment poétique. Il permet de faire ressortir l’humanité des rencontres, la fragilité mais aussi la force de la jeune femme et la beauté du rapport entre l’homme et la nature. La nature joue en effet son rôle dans l’apaisement, le retour à soi. Un épilogue de toute beauté vient clôturer ce roman qui m’a rendue exsangue.

Je ne sais pas si je peux vraiment conseiller la lecture de ce livre car je pense que le prologue peut choquer plus d’une personne mais je suis stupéfaite du traitement littéraire par l’auteur des thèmes de la violence et de la résilience. Je remercie vraiment Gilles Marchand pour ce conseil qui sort des sentiers battus et invite à sortir de sa zone de confort.

 

Marc Graciano – Au pays de la fille électrique – Editions Corti – 150p

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Commentaires
L
Bon il semblerait que mon commentaire n'ait pas fonctionné alors je recommence (il est vraiment temps que cette journée se termine...).<br /> <br /> <br /> <br /> Si Gilles te l'a conseillé toi tu m'as convaincue de me le procurer malgré la thématique très douloureuse qui y est abordée. <br /> <br /> Je rebondis sur la couverture du roman que je trouve personnellement extrêmement touchante.
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L
Et bien Gilles te l'a conseillé et toi tu m'as convaincue de me le procurer. Malgré la thématique douloureuse il semble que la lumière soit au bout du tunnel. Et comme tu le dis, il nous sort de notre zone de confort.<br /> <br /> Je rebondis sur la couverture que je trouve très émouvante personnellement.
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