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LES LECTURES DU MOUTON
27 octobre 2016

« Deux remords de Claude Monet » de Michel Bernard

2016-07-03 01

« Il fit entrer plus largement dans la pièce le début du jour en ouvrant à demi les volets, puis il alla chercher une toile, un pinceau, sa palette et quelques tubes de couleur. Il installa une chaise au bout du gisant, s’assit, appuya le haut de la toile posée sur ses genoux contre les barreaux du pied du lit, et commença de représenter les traits de la morte tels qu’il les voyait. Avec du bleu et du blanc, il fit monter à la surface du monde, une dernière fois, le visage de Camille. Les joues avaient fondu, le nez était déjà pincé, la peau tirée sur l’os avait déjà pris, par place, une teinte jaune tirant sur le gris. Monet alla chercher d’autres tubes pour restituer aussi cela, les progrès de la corruption sous la peau si souvent embrassée, dans la chair si bien étreinte. Pour terminer, il sabra de traits verts le milieu de la toile et les moucheta de pointes de rouge. C’étaient les fleurs de septembre qu’il avaient disposées sur les mains de la morte. »

Ma première rencontre littéraire avec Michel Bernard eut lieu il y a presque deux ans avec la lecture de Les forêts de Ravel. J’avais été conquise par l’écriture délicate, fluide de l’auteur mais aussi par l’idée de raconter un compositeur et son œuvre par ses expériences de vie.

Avec Deux remords de Claude Monet, on retrouve ces deux aspects que j’avais aimés avec son précédent roman.

Michel Bernard raconte dans un roman en trois parties deux personnes importantes et sources majeures d’inspiration de Claude Monet : Frédéric Bazille et Camille Donzieux.

La première partie du roman est l’histoire d’amitié avec Frédéric Bazille, son ami peintre qui meurt bien trop tôt dans les combats de Beaune-la-Rolande en décembre 1870. La deuxième partie est l’histoire d’amour avec Camille qui a été son modèle mais aussi sa femme. Celle-ci meurt aussi bien trop jeune, emportée par un cancer en 1879.

C’est donc à travers ces deux prismes qu’on découvre la vie de Claude Monet : ses années de galère pendant lesquelles sa femme le soutient contre vents et marées, les amitiés avec Renoir, Sisley, Manet, Pissarro, l’arrivée des mécènes comme les Hoschedé ou les Durand-Ruel, l’ascension, Giverny, les Nymphéas, la mort qui lui arrachera un ami, deux femmes et un fils…

La dernière partie, intitulée « Claude », raconte les dernières années de vie de Monet à Giverny : l’accompagnement de sa bru Blanche, les visites de Clemenceau, les problèmes de vue. L’auteur explique pourquoi Monet prépare sa mort, son héritage. S’il accepte de faire don à l’Etat des Nymphéas pour qu’ils soient installés à l’Orangerie, il impose aussi l’achat d’un tableau – Femmes au jardin – pour être exposé au Louvre. S’il n’a jamais donné une explication, après la lecture des deux premières parties, on sait pourquoi il était attaché à cette demande. Une exigence d’amour et d’amitié.

J’ai été une fois de plus emportée par l’écriture de Michel Bernard et par cette histoire méconnue, tragique mais belle de l’un de nos plus célèbres peintres. Je vous recommande la lecture.

Je remercie les éditions La Table Ronde et notamment Anne-Lucie Bonniel pour cette belle lecture.

Michel Bernard – Deux remords de Claude Monet – La Table Ronde – 210p.

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