« Celui-là est mon frère » de Marie Barthelet

Premier roman

« En te voyant, j’ai pensé que tu étais revenu pour moi, puis que tu avais vieilli. Je me trompais. Déjà tu souhaitais repartir. Et ce n’était pas tant que tu avais vieilli, tu étais transformé - défiguré, allais-je dire, par la brûlure d’une foi neuve. J’ai aussi cru que je délirais. Mais ton nom susurré par tous ceux qui étaient présents a craquelé le silence. J’ai compris que je n’étais pas le seul à te voir. Que c’était vrai. Que c’était toi. »

Lu dans le cadre des 68 premières fois, ce roman avait déjà suscité ma curiosité puisque je l’avais inscrit dans ma liste des livres à lire de la rentrée littéraire 2016. Je pressentais un roman atypique et c’est plutôt le cas même si Marie Barthelet reprend à son compte le récit biblique de l’Exode.

Nous sommes dans un pays non situé mais dont les paysages font penser à l’Egypte. L’époque n’est pas déterminée mais l’allusion à la télévision montre une temporalité proche de la nôtre. Les deux personnages principaux sont un roi et son frère adoptif. Ce dernier revient après plusieurs années de disparition. L’émotion est grande pour le roi mais la joie fait rapidement place à la désillusion et à la déception. Le revenant se braque contre son frère de roi et le voit comme l’oppresseur du peuple dont il est originaire. Une série de plaies s’abat sur le pays pour faire plier le roi. Cruel est le destin quand deux frères si complices enfants deviennent des ennemis jurés. Comment ne pas penser à Pharaon et Moïse ?

En mêlant récit biblique et monde contemporain, en ne donnant aucun indice spatio-temporel tangible, Marie Barthelet nous offre un conte universel sur les thèmes de l’amour, la fraternité, la guerre et la trahison. Ces aspects sont accentués quand l’auteure narre les réminiscences du roi. Peu importe où ça se passe, qui ça touche, tout le monde peut se retrouver ou retrouver une partie de son monde dans cette histoire.

L’ensemble est servi par une écriture maîtrisée et élégante. A la lecture, je n’ai pas pu m’empêcher de voir des liens avec certains romans de Laurent Gaudé (je pense notamment à La mort du roi Tsongor). Un premier roman très prometteur.

Marie Barthelet – Celui-là est mon frère – Buchet/Chastel – 168p.