Premier roman
« ’Que faites-vous dans la vie, Marjorie ?
- Je suis une danseuse reconvertie.
- Reconvertie dans quoi ?
- Je ne le sais pas encore. Je cherche. En attendant, je donne des cours.
- Vous cherchez à transmettre votre savoir, peut-être, c’est un beau projet ça…
- Je n’aime pas ce mot, il est trop vague. On l’utilise partout aujourd’hui, vous savez. Je cherche à construire, c’est plus vaste. Construire, c’est aller des fondations au dernier étage de la maison. C’est à la fois bâtir en partant de rien, fixer ensemble les différentes parties d’un objet, élaborer quelque chose, et disposer dans un certain ordre. Exactement comme la danse.
- Je vois. Vous ne cherchez pas tant que ça, alors, vous êtes sur le point de trouver’.
Et, en prononçant cette dernière phrase, Justine regarde Marjorie du coin de l’œil, en souriant. »
Marjorie a quarante ans. Danseuse étoile, elle doit mettre un terme brutal à sa carrière : son corps ne suit plus, il est devenu trop fragile. Cette épouse et mère de famille se retrouve ainsi en « reconversion ». Pour rebondir, elle va vite se rendre compte qu’elle doit affronter et accepter son lourd passé. Marjorie, en effet, s’appelle en réalité Tin. Elle est arrivée du Cambodge avec ma mère en 1975 pour fuir le régime des Khmers. Mais, son père lui est resté et en est mort et cette souffrance de l’absence ressurgit.
Au même moment, son mari Paul doit faire face à des problèmes familiaux qu’il a trop longtemps tenté d’éviter. Le couple arrivera-t-il à faire le pas de deux dans ce ballet compliqué et enfin se libérer ?
Caroline Broué nous offre un premier roman qui a la grâce et la légèreté d’une danseuse. L’écriture est plutôt fluide. La construction en revanche peut décontenancer au départ car on a des changements d’espace-temps assez nombreux. Sans être un coup de cœur j’ai été touchée par la beauté des mots et du style de l’auteure.
Caroline Broué – De ce pas – Sabine Wespieser éditeur – 170p.